Par rapport aux autres noyaux de la carte nucléaire, les noyaux lourds et superlourds ont ceci de particulier que la force de Coulomb entre les nombreux protons du noyau n’y est plus une petite perturbation. Cela se reflète dans les hauteurs des barrières de fission qui chutent radicalement pour les noyaux situés au-dessus de la région de 208Pb. Cela a pour conséquence qu’une petite augmentation de l’énergie d’excitation du système nucléaire suffit pour entraîner la fission et que la fission spontanée est déterminante pour la stabilité des systèmes les plus lourds. Ces systèmes lourds représentent un défi théorique en raison de la grande densité d’états et de l’effet polarisant de la force de Coulomb.  Au niveau atomique, les effets relativistes croissants amènent des modifications importantes des propriétés électroniques de ces éléments. En plus d’aborder la question fondamentale du comportement de la matière nucléaire en présence d’un fort champ de Coulomb, les travaux de recherche pour déterminer les propriétés des systèmes nucléaires les plus lourds ont également une incidence dans d’autres domaines de recherche. C’est le cas pour la modélisation du processus r, puisque les abondances élémentaires finales résultent de nombreux cycles successifs de capture de neutrons, de désintégration bêta et de la fission d’un noyau très lourd.

A  IJCLab, 4 thèmes de recherche sont poursuivis concernant les noyaux lourds et super lourds:

Synthèse

Parce que la recherche des éléments super lourds est en même temps une exploration de la terra incognita de la carte nucléaire, trouver des mécanismes de production optimaux pour ces noyaux très exotiques est un sujet de recherche majeur. Les prédictions théoriques peuvent différer de plusieurs ordres de grandeur. C’est pourquoi, les mesures des fonctions d’excitation de fusion-évaporation sont cruciales et ont été réalisées par nos chercheurs aussi bien à l’aide du l’ensemble de détection GABRIELA placé au plan focal du séparateur SHELS à Dubna que de l’ensemble de détection GREAT placé au plan focal du spectromètre RITU à Jyvaskylä. D’autres mécanismes de production sont également de grand intérêt, telles les réactions de transfert multi-nucléon, sujet émergent, qui est étudié par nos équipes avec des expériences au GANIL et à l’Argonne National Laboratory (ANL). L’évolution prévue de l’injecteur SPIRAL2 vers A/Q = 7 admettant des projectiles de haute intensité jusqu’à l’uranium (projet NEWGAIN) permettra d’étendre ces études en France.

 

Le système de détecteurs GABRIELA au FLNR à Dubna
L’installation GAMMASPHERE à l’Argonne National Laboratory

Fission

La fission est un processus important se produisant soit spontanément, soit à la suite d’une réaction ou d’une désintégration nucléaire dans la région des noyaux lourds et superlourds, mais qui reste un phénomène assez mal compris (et encore plus mal décrit). Des études sur la fission sont réalisées à l’installation ALTO d’Orsay à l’aide de la source de neutrons LICORNE et du réseau NuBall. Elles ont récemment apporté un nouvel éclairage sur la génération du moment angulaire dans le processus de fission.

Structure nucléaire et atomique

Dans le but ultime d’améliorer la connaissance de leur structure et de construire un modèle microscopique fiable pour faciliter l’extrapolation dans des régions inconnues, un effort considérable est en cours, impliquant nos équipes, pour déterminer les propriétés des noyaux lourds et super lourds par un large éventail de méthodes. Notre pôle est engagé dans un certain nombre de collaborations internationales pour réaliser des expériences de spectroscopie sur faisceau et  après désintégration des éléments lourds et superlourds, auprès des détecteurs SAGE à Jyväskylä, GAMMASPHERE et GRETINA à l’ANL et enfin GABRIELA à Dubna. Nous participons aussi activement au développement de nouvelles expériences de ce type qui seront réalisées à  SPIRAL2, soit directement après le spectromètre S3, en utilisant les ensemble de détections SIRIUS et la Ligne de Basse Energie, soit en utilisant des techniques de manipulation et de spectroscopie haute résolution à basse énergie dans l’installation DESIR. Dans ce même ordre d’idées, nous contribuons à l’installation MLLTRAP, qui est un spectromètre à piège de Penning développé au sein du pôle accélérateur de l’IJCLab pour les mesures de masse et la spectroscopie en piège, tout d’abord à ALTO à Orsay, puis à DESIR.

Théorie nucléaire

En collaboration avec le CEA-DAM, l’IJCLab participe activement à l’interprétation des résultats expérimentaux et à l’orientation des expériences futures en effectuant des calculs microscopiques décrivant les propriétés statiques et dynamiques des noyaux super lourds (QRPA et Hamiltonien de Bohr).